jeudi 3 avril 2014

Un thriller scientifique "real life" : l'étude japonaise sur les cellules souches fraudée et en partie validée ?

Cette histoire pourrait donner matière à un thriller.
1 avril 2014 : le comité d'enquête de RIKEN institut de recherche à Tokio annonce que sa jeune chercheuse Hauko Obokata a manipulé des données au moins à 2 endroits dans son étude scientifique, publiée fin janvier dans la prestigieuse revue "Nature".

Début de l'année, elle était fêtée dans les médias japonais comme une starlette de la recherche - suite à cette même publication, qui aujourd'hui est mise en cause. La jeune trentenaire y avait publié un protocole inédit et à bien des égards simplissime pour produire des cellules souches pluripotentes. Pour être précise : des cellules STAP (stiumulus-triggered acquisition of pluripotency, acquisition de pluripotence par stimuli).

Des cellules souches pluripotentes en soi, n'ont rien de nouveau. Déjà depuis 2006, les chercheurs savent les produire en utilisant des cellules adultes de pratiquement tous les tissus corporels pour les transformer en cellules souches induites pluripotentes. Ces cellules ressemblent aux cellules souches embryonnaires. Elles sont de véritables "génies universels" capables de se multiplier à l'infini et de se différencier en tous types de cellules d'un organisme humain. Prouesse scientifique recomposée par le prix Nobel de médecine en 2012.
 
Stress-treated lymphocytes expressed
pluripotency marker Oct4.
Right: STAP cells.
Credit: Haruko Obokata
Imaginez le potentiel énorme de ces cellules : facilement accessibles et en quantité illimité, elles pourraient permettre de régénérer des organes entier.

Hauko Obokata et ses co-auteurs affirmaient fin janvier 2014 avoir simplifié la façon d'obtenir ces cellules souches pluripotentes en les plongeant dans un bain légerment acide afin de les stresser suffisamment pour les transformer en cellules souches, ce qui suscite émerveillement et ... méfiance.

Travail scientifique révolutionnaire de nature à changer la face des biotechnologies ou irrégularités méthodologiques, erreurs de manipulation voire fraude délibérée?

L'annonce de la fraude il y a deux jours sera probablement la fin de la carrière de la jeune chercheuse. C'est elle, qui sera sacrifiée pour les fautes d'une étude, dans laquelle 7 autres chercheurs étaient impliqués comme co-auteurs.

Cela pourrait être la fin de cette histoire.

Mais ce n'est pas le cas. Car un autre chercheur indépendant, Kenneth Ka-Ho Lee de la Chinese University of Hong Kong, a annoncé également le 1 avril sur le portail Research Gate, qu'il aurait reproduit des parties signifiantes des résultats de la publication de Obokata. 

Poison d'avril original ? Ou est-il finalement possible de produire des cellules souches pluripotentes par stress ?


Passion, déception, célébrité, tricherie, la quête vers la vérité, une jeune starlette, des institutions, des questions d'éthiques et médicales qui nous touchent tous ... tout y est : la matière pour un bon thriller scientifique !

1 commentaire:

  1. Suite à une discussion avec des doctorants, je vous rappelle le cas du physicien allemand Jan Henrick Schön, qui avait manipulé des données dans le domaine des nanotechnolgies. En 2002 une bonne dizaine de ses publications dont la plupart dans Nature et Science ont du être retirées ...

    Bien sûr on peut demander : comment Nature n'a-t-elle rien vu ? Les chercheurs savent que le "review process", c'est à dire le système de comité de relecture avant publication, n'est pas fait pour détecter du comportement frauduleux - la recherche est basée sur la confiance et l'intégrité des chercheurs.

    Ce qui me semble intéressant ce sont aussi les possibilités techniques dont les chercheurs disposent aujourd'hui pour discuter des résultats scientifiques moins ou less "en direct" sur des sites tels Research Gate.

    RépondreSupprimer

Ajoute ton commentaire !
Vous pouvez être aussi critiques et controverses que vous voulez, mais s.v.p. ne devenez ni personnel, ni agressif et gardez-le court !